Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

02 mai 2007

Colère !

Jeudi dernier, ce furent les obsèques les plus tristes auxquelles j'ai assisté jusqu'à aujourd'hui. Et voir les tiens si affligés, tes meilleurs amis et puis surtout, ton frère et ton père, si tristes, si désolés...

Pour moi, c'était comme la négation de tout ce qui avait été entrepris jusque là. Quand on élève un enfant, on n'imagine pas un instant qu'il puisse mourir avant nous et encore moins qu'il abrège sa vie! On essaie de tout faire pour l'armer pour une vie heureuse, responsable, riche et épanouissante, avec la capacité de rebondir toujours.

Toi tu avais bénéficié d'un père admirable d'abnégation et de combattivité, qui remuait ciel et terre pour que tu t'en sortes et que tu guérisses. Tu avais un frère qui t'aimait et avec qui tu avais noué une relation fusionnelle, trop parfois, ce qui te faisait détester ses premières amours. Pour ma part et pendant de nombreuses années, j'ai joué - un peu - avec une poignée d'autres femmes aussi autour de toi, le rôle de la mère que tu n'avais plus depuis presque toujours. Sans jamais pallier ce manque si lourd pour toi, sans jamais nous croire à sa place non plus.

Et ta famille a été si présente, si forte face à la maladie! Nous te voyions si épanouie ces deux dernières années que nous avons cru que le bout du tunnel était en vue: nous avons tous baissé la garde. Et pour une fois, la seule, nos antennes n'ont rien perçu, nous n'avons pas senti d'appel muet de ta part comme tant d'autres fois. Non, aucun appel au secours cette fois, tu l'avais décidé pour de bon le geste irrémédiable. Comme nous l'avons découvert depuis dans tes écrits des derniers jours, tu avais fait ton testament, tu avais pensé à tout, ensuite tu es allée passer un examen... que tu as réussi brillamment, mais ça tu ne le sauras jamais... puis tu t'es enfermée chez toi et deux jours après... Comme le dit ton père, "cette fois je ne la ramènerai pas (à la vie)".

Il était vain de croire remplacer ta mère un jour, mais nous pouvions croire que toi, tu arriverais à surmonter ce manque en grandissant, par la réussite de ta vie personnelle et de tes études, brillantes. Grâce à ton intelligence certaine, grâce à ta sensibilité artistique si vive, grâce aux liens noués si difficilement, mais ça aussi tu y étais arrivée: il n'y avait qu'à voir le nombre de tes amies et amis venus te dire adieu jeudi pour se rendre compte que ta socialisation était immense et combien toutes ces personnes t'avaient trouvée attachante elles aussi. Et nous pouvions rêver au jour où tu tomberais très amoureuse et où ce lien-là t'arracherait pour toujours à ton désespoir, car plus fort enfin que l'angoisse et la détresse qui t'habitaient si souvent, trop souvent...

Aujourd'hui je pense aux proches de tous ces enfants qui se suicident, par manque de père, de mère, pour cause de coups, d'inceste, de maltraitance, de misère, à cause de la cité, en raison du racisme ambiant, de la méchanceté bête ou de l'homophobie. Et je suis en colère après celui qui prétend que le suicide est inscrit dans les gènes! Non, on ne naît pas suicidaire!

Certains ont moins de chances que d'autres dans la vie et partent avec une mauvaise donne de cartes, pas génétiques mais bien réelles. Si la médecine fait des progrès, la maladie qui a emporté la mère de C. trop tôt ne tuera plus autant de parents, d'épouses, ni de fils, ni de filles, ni de soeurs, ni de frères. Cette maladie-là s'appelle le cancer et elle n'est pas génétique, en revanche l'utilisation de pesticides à outrance semble bien être responsable de sa croissance spectaculaire dans tous les pays développés!

Et d'autres jeunes se foutent en l'air parce qu'ils sont victimes de la connerie et de l'intolérance et là, il y a du boulot pour les hommes politiques: c'est la lutte contre les discriminations qui importe et non de décréter sans réfléchir que le suicide c'est inné. Ca, c'est vraiment n'importe quoi! Lutter contre le suicide des jeunes, c'est prendre à bras le corps les problèmes de société et les affronter: c'est instruire, éduquer, informer, et surtout, surtout, aimer les citoyens que l'on gouverne... bien plus que le pouvoir!

Pour l'heure, je gère ma peine comme je peux, tout en me plongant dans le travail, il ne s'agit pas d'oublier les autres qui ont besoin d'aide. Et je n'oublierai pas de voter dimanche non plus, n'ayez crainte!

N'empêche, p**ain que ça fait mal une si jeune vie qui s'en va! 

20:50 Publié dans Colère, Tristesse | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Hommage

Commentaires

Une des phrases préférées de C., tirée d'une de ces séries télé qu'elle adorait, était : "The hardest thing in this world is to live in it".

J'aurais aimé comprendre la portée de cette phrase plus tôt.

Aujourd'hui, il est important de dire, haut et fort, que le suicide n'est pas génétique. ça serait tellement facile, blâmons le génétique !

Car la lutte ne cessera pas tant que notre société n'admettra pas ses fautes : on nous culpabilise à outrance, on nous dit ce que nous devons être, et surtout ce que nous ne devons pas être.

Petit extrait de Prévert : "Je suis ce que je suis, je suis faite comme ça."

A méditer...

Écrit par : Guillaume | 06 mai 2007

Je suis extrêmement sensible à ce billet.
Pardon de ça, mais quand même, toujours, merci de toi

Écrit par : Patricia-M ! | 07 mai 2007

Les commentaires sont fermés.