17 juin 2006
Nouvelles du front
Jeudi nous avons adopté une nouvelle coupe en brosse, "a crop-cut" comme on dit aux USA. Ca lui va super bien, la beauté de son visage est tellement mise en valeur, ce que je n'ai de cesse de lui dire! Un peu réticente au départ à l'idée que je suive le mouvement, une fois ma nouvelle tête terminée je sais dans ses yeux comme je lui plais, et ses mots me le confirment. Et oui, il faut oser! La vie est trop courte pour ne pas se permettre toutes nos envies: une femme à cheveux très courts, c'est beau et très séduisant, du moment qu'on lâche tous ses a priori sur les looks qu'on est censé adopter, qu'on soit homme ou femme!
A ce propos si vous voulez des idées de coupe, il y a un site génial sur ce lien:
http://www.haircuts.ru/foto/crop_e.html
Dans une dizaine de jours nous passerons à la version GI Jane, puis le traitement se chargera de terminer la coupe de MaryL dans les jours suivants. Je ne sais si je serai solidaire jusqu'au bout, - il y a le boulot, quoique je suis capable de tout et ils le savent, genre, tiens! une originalité de plus!... et puis c'est pour ce qu'il y a dans ma tête et pas sur ma tête qu'on me paie, m'enfin!... - mais cela me tente assez pour l'été, surtout qu'il fait une canicule d'enfer! Il y a juste que moi j'ai le choix et que cela rend les choses tellement plus faciles! Shit!
Mais regardez comme ces femmes sont belles! Cessons d'y voir les stigmates d'une maladie! Ces coupes de l'extrême donnent un look extra où la femme explose de féminité et de beauté.
http://www.haircuts.ru/foto/bald_e.html
http://www.haircuts.ru/foto/shaved_e.html
Vendredi nous avons affronté pour la première fois la section 'hospitalisation de jour' du service d'oncologie de l'hôpital pour la pose du PAC; arrivée huit heures, intervention à pas-d'heure-prévue vous-verrez-bien-madame, ah bon vous ne faites pas le traitement aujourd'hui? lundi, vous êtes sûre? parce que s'il y a un hématome, on ne pourra pas piquer dans le PAC et il faudra revenir dans huit jours... c'est embêtant, qui a décidé ça!?... nous ne sommes pas au courant, personne ne nous en a informés,... faut que je vois avec le docteur, etc
Le summum du conflit médecins-cadres infirmiers, nous on n'a pas besoin de supporter ça, ça commence mal. En même temps, on les sent stressés, et vu leur métier à longueur d'année, les soins lourds, les pathologies lourdes, les difficultés de gestion parfois, l'impuissance à guérir dans certains cas, on peut les comprendre... travail flippant et don de soi, nerfs à vif et disponibilité de tous les instants aux patients, probablement pas toujours faciles... Nous ne devrons pas oublier que nous avons affaire à d'autres humains, fragiles eux aussi et nous tâcherons de ne pas oublier leur fatigue potentielle et leur dévouement presque sans faille. Ne pas penser qu'à soi. Surtout pas. Ne pas se laisser enfermer par la maladie.
Entrevue avec le médecin: on risque d'attendre jusqu'en début d'après-midi, mais le temps passe avec quelques examens complémentaires et les traditionnelles prises de données phy.
Surprise, dix heures trente, la porte s'ouvre, on vient vous chercher pour le bloc madame, elle murmure: "Je n'ai droit à aucune prémédication? Parce que je croyais..." Non, c'est descente directe en salle d'op. Je suis son lit jusqu'à l'ascenseur et elle a juste le temps de me faire un grand coucou et de me dire "T'inquiète pas, je n'ai pas peur". Je le vois dans ses yeux mais je sens aussi son stress, palpable. Je sais que l'intervention en local prend de 20 minutes à 40 minutes et je souhaite de tout mon coeur que tout se passe au mieux et sans douleur. La souffrance de celle que j'aime, noooon, oh noooon... On m'informe qu'elle remontera dans une petite heure grand maximum, alors je vais buller dans l'entrée de l'hôpital, feuillette des revues sans lire chez le marchand de journaux, ressors dans le couloir direction les parkings, puis passe un coup de fil professionnel pour évoquer l'idée d'un éventuel retard. J'ai la tête vide, le regard rivé sur la montre, comme le 17 mai durant la longue opération, c'était sacrément plus long. Oui mais là elle dormait, aujourd'hui elle ne dort pas! Je regrette de ne pas avoir insisté ce matin pour qu'elle prenne un léger calmant à la maison. Et elle qui ne supporte pas même la vue d'une prise de sang!
Le temps n'avance pas, pourvu qu'elle soit bien, que le chirurgien soit bon et puis 20 minutes ça sufffit bien comme ça, ça fait quarante minutes maintenant qu'elle est là-bas, alors je remonte dans le service! Une fois dans la chambre, je tourne en rond, ouvre la fenêtre plus grand, ressors dans le couloir. C'est anormalement long, cela n'en finit plus, je ne le sens pas ce truc, j'ai comme une boule chaude dans la trachée, il y a quelque chose qui déconne je le sens. Ma belle va effectivement remonter au bout d'une heure vingt, blanche comme le drap, immobile sur le lit, et ce qui me frappe immédiatement, en bien moins bonne forme qu'au retour de son opération le mois dernier! Le comble!
Je me précipite: "Tu as mal?" Un faible murmure me répond: "Non je n'ai pas eu mal du tout." Au même moment l'aide-soignante qui pousse le lit me dit en souriant avec une gentillesse qui me touche "Oh, elle nous a fait un petit malaise, ... il ne faut pas la laisser seule...". J'apprendrai par la suite le déroulement des évènements, le chirurgien vasculaire qui a l'air compétent dans son boulot, mais bien maladroit sur un plan humain, n'a rien trouvé de mieux que de déclarer sur la fin de l'intervention : 'Ah bon, votre chimio est lundi? oh mais au bout de trois jours, ce n'est pas une bonne idée, s'il y a une infection, ce ne sera pas ma faute!'
Alors là, ma douce n'a plus su ce qui était bien ou pas à faire, ni qui croire et en qui avoir confiance, et elle s'est sentie mal et elle a tout juste eu le temps de le dire, d'où masque à oxygène et compresses froides sur le visage jusqu'à ce qu'elle revienne à un état plus stable! En plus il n'était apparemment pas au courant qu'il ne devait pas laisser l'aiguille en place, mais alors à quoi ça sert les dossiers s'ils ne les lisent pas, les consignes du cancérologue à ce sujet y figuraient en bonne place! Heureusement qu'elle était suffisamment lucide pour le lui faire remarquer, parce que sinon bonjour le confort, surtout pour trois nuits!
On est parties de là à 15 heures après qu'elle ait pu manger et se requinquer, puis terminer les derniers examens utiles au jour J, non sans avoir signalé au médecin ce qui s'était passé, laquelle s'est montrée assez rassurante.
Mais il faudrait voir à ce qu'ils accordent leurs violons! Que de stress! 'tain, pourvu que ça soit pas ce merdier lundi pour la chimio, parce que comme mise en confiance, il y a mieux!
Et puis j'ai travaillée vannée jusqu'à 20 heures pendant qu'elle somnolait dans notre chambre, on a dîné en vitesse après un coup de fil à notre gynéco qui nous a bien rassurées: quelle personne pleine de tact et d'informations utiles, franche et peu avare de bons conseils si utiles depuis le début! Thank you Doc!
MaryL dort paisiblement, moi je suis debout depuis 4h30 du mat'. Cela fait un bon moment que je ne dors que cinq ou six heures et ce n'est pas sûr que ça va s'arranger dans les jours à venir... Mais la mauvaise herbe est résistante!
06:45 Publié dans Lame de fond | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : Vaincre la maladie
Commentaires
Globalement, à chaque post que tu rédiges j'ai simultanément le sourire et une balle de ping-pong dans la gorge. A moins que ce ne soit une raquette, ça dépend.
Pour la coupe de cheveux le site rapporte de très beaux visages...C'est marrant quand quelqu'un a des cheveux, je l'iamgine chauve et quand je croise un/e chauve, je l'imagine chevelu/e. Ca marche avec nu/e et habillé/e aussi.
A bientôt, Mesdames !
Écrit par : Patricia-M | 17 juin 2006
Quelle épreuve ! je n'ai pas de mots particulier, juste te/vous dire: courage !
Écrit par : Indilou | 18 juin 2006
J'ai lu les derniers posts et je les trouve très touchants, je vous souhaite bon courage, vous êtes un couple qui respire l'amour, ça se sent au premier coup d'oeil.
Écrit par : Justine | 20 juin 2006
Les commentaires sont fermés.